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Kamal Lyatim, un artiste mais surtout un passionné

Kamal Lyatim. C'est certainement un nom qui ne vous dit rien mais pourtant son art et son talent méritent vraiment le détour puisqu'il réalise des voitures miniatures en papier. Ce qui fait de lui, le seul marocain à avoir un tel savoir-faire.

Passionné d'art déco et d'art contemporain, il suit en 1996 des études en arts plastiques au lycée. Une fois son baccalauréat en poche, il souhaite intégrer un tout nouveau Centre de Recherche et d'Engeneering Automobile à Casablanca. Mais malheureusement, le Centre change soudainement de programme. Il n'y a plus aucune formation de design automobile. C'est une énorme déception pour Kamal qui décide alors de se tourner vers l'étranger pour suivre des études de design. Mais hélas, c'est hors de prix. Il faut compter entre 300.000 et 500.000 dirhams pour suivre cette formation.
Sans se décourager une minute, il suit une formation en arts graphiques, ce qui lui permet de gagner sa vie en tant que directeur artistique dans une agence de publicité. Agé de 30 ans aujourd'hui, ce natif de Casablanca consacre pleinement ses week-ends et son temps libre à sa passion. Interview.

- Yabiladi : D'où vous vient cette passion pour les voitures ?
- Kamal Lyatim :
Comme 99% des petits garçons, j'adorais les belles voitures de marques, les supercars et les sports mécaniques. Mais au delà de ce coup de foudre, j'avais une passion pour le dessin. Mais, un jour je me suis posé une curieuse question : "Pourquoi mes dessins sont-ils si plats ?". Je me suis dit qu' il me fallait une réalisation en volume plus réelle et plus vivante !
Alors à 6 ans, j'ai commencé à réaliser mes premières maquettes en papier avec de simples outils comme des ciseaux, de la colle en tube, peinture acrylique etc... Avec du travail et de longues années de mise en volume de formes complexes sur différents types de support papier, j'ai fait de ma passion pour les modèles réduits un art à part entière.
Vous allez sûrement me demander, pourquoi le papier ! Tout simplement parce que c'est facile à manipuler. J'ai essayé d'autres matériaux comme la patte à modeler, l'argile synthétique, la mousse synthétique ou encore le plâtre, mais je n'étais pas satisfait. Grâce à sa finesse, sa texture, et surtout par son rendu final souvent épatant sur une maquette, le papier reste pour moi un outil incontournable pour réaliser mes œuvres et démontrer que l'art n'a pas de limite.

- Vous avez fait une grande exposition en novembre 2007 à Casablanca dans laquelle vous avez présenté vos maquettes. Mais depuis, plus aucune exposition. On n'a plus entendu parler de vous. Que s'est -il passé ?
- En effet, grâce au partenariat que j'avais signé avec le groupe ECO media, mon exposition intitulée"Paper'Cars" fût un grand événement, non seulement pour moi mais aussi pour les visiteurs qui sont venus découvrir mon travail. Je tiens à dire qu'il ne s'agissait pas de ma toute première exposition. J'en ai fait d'autres auparavant notamment en 1993 au Centre Culturel français et une autre en 1995, mais elles étaient moins médiatisées. Paper'Cars m'a vraiment permis de faire de nombreuses apparitions sur la scène artistique nationale. J'ai eu beaucoup de retombées médiatiques. J'ai été invité sur les plateaux télé de 2M et de la RTM.
Cependant, ce n'était pas la dernière exposition puisqu'en mars 2008, j'ai présenté Paper'Cars aux participants et concurrents du Rally.en partenariat avec le Rally Classique du Maroc.

- Comment avez-vous financé cette exposition ?
- Paper'Cars est le fruit de mon investissement en temps et en argent. C'est un projet qui date de 2003. J'ai cherché pendant de longues années des sponsors. Mais en vain. J'avais présenté mon dossier de sponsoring à des sociétés de papier, à vraiment tous les concessionnaires automobiles du Maroc sans exception, aux sociétés de télécom, à de grandes marques de boissons énergétiques et la liste est très longue. Mais sans résultat. Je n'ai pas eu de réponse. J'ai finalement décidé en mars 2007 de sacrifier mes épargnes et mon job pour ma passion...
J'ai quitté mon travail pour préparer l'exposition qui m'a demandé plus de 5 mois d'organisation. J'ai dû vivre sans aucun revenu pendant 5 mois avant l'exposition mais également 3 mois après. Au total, j'ai investi plus de 73.000 dirhams sur l'ensemble de l'opération. Un montant qui inclut les dossiers de sponsoring, campagne de communication, impression des affiches, les dossiers de presse, les invitations, soirée d'inauguration, fabrication des vitrines pour les maquettes et fabrication des présentoirs.
Aujourd'hui, ce que j'ai investi dans ma passion est avant tout une satisfaction personnelle, un épanouissement personnel, un devoir accompli. J'ai voulu transmettre un savoir-faire, lancer un tout nouvel art sur la scène artistique nationale, une scène que je trouve hélas, coincée et enfermée dans un cadre d'art classique qui se limite seulement à la peinture, la sculpture ou à la musique. J'ai joué toutes mes cartes ou presque sur Paper'cars, et je ne vous cache pas que, faute de fonds et de sponsors, je ne peux vous promettre une prochaine exposition.

- Vous avez reçu des prix à l'international pour vos maquettes. Quels ont été ces prix ?
- Au Mondial de la Maquette et du Modèle Réduit à Paris en 2006, j'étais le premier Marocain à y avoir remporté deux médailles argent et bronze pour 2 maquettes que j'ai réalisé. Cela m'a d'ailleurs valu plusieurs échos sur des supports de média nationaux. En 2004, lors des championnats d'Europe de modélisme à Paris j'ai reçu un certificat de mérite pour l'une de mes maquettes.
Au Maroc, on est encore prisonnier de l'art classique. La culture artistique nationale manque d'audace. Je ne met pas en cause nos artistes marocains car j'en fais partie. Nous, artistes, sommes en quelques sorte des victimes. Victimes, car on ne peut pas imposer notre créativité car on manque de subventions, de fond, de sponsoring et surtout d'engagement citoyen.

- Comptez-vous rester au Maroc pour promouvoir votre art ?
- Actuellement je travaille pour mettre en ligne mon site web dédié à la réalisation de modèles réduits en papier. C'est moins coûteux qu'une exposition ! Cela permettra à beaucoup de découvrir mon travail et pourquoi pas de s'y inspirer !. Le Maroc est mon pays et j'en suis fier. Il n'empêche que je suis tenté par une carrière artististique ailleurs. Donc pour répondre à votre question, oui je partirai bientôt, Inch Allah, à l'étranger !


Farida Lamrani
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