Antipiratage: Descente musclée à Derb Ghallef

Bilan: quelque 10.000 articles (CD, VCD, DVD…) saisis. A rappeler qu’il y a une semaine, une opération similaire a été menée dans la province d’El Jadida et à Sidi Bennour. Selon Khalid Noukri, secrétaire général de l’Appep, au total nous avons saisi plus de 27.000 CD, DVD et VCD, soit 10.000 à Casablanca, 2.000 à Sidi Bennour et 15.000 à El Jadida.

«A El Jadida justement, nous sommes sur une piste pour saisir des graveurs. Cela demande beaucoup d’investigations», précise Noukri. Contrairement aux préjugés, Derb Ghallef n’est rien comparé à des villes comme Fès et Meknès, qui sont de véritables plates-formes industrielles de piratage. Dans ces deux villes, des jugements ont été prononcés récemment avec des peines allant de l’amende à l’emprisonnement.

Les CD saisis sont déposés dans les arrondissements desquels relève la zone. Après, les autorités procèdent au broyage et à l’incinération de la marchandise en présence des médias, des représentants du Centre cinématographique (CCM) et de l’association des droits d’auteur.
Le Maroc est classé parmi les premiers pays qui enregistrent de forts taux de prolifération du piratage. Avec un taux de 70% pour les logiciels, les CD vidéo et audio, le Maroc est «black-listé», car l’activité illicite prend des proportions inquiétantes et entraîne des pertes économiques estimées à quelque 2 milliards de DH, selon le Bureau marocain des droits d’auteur (BMDA). Les pertes dues à la contrefaçon de CD sont estimées à près de 200 millions de DH. Selon le représentant de l’Appep, «il y a quelques années, 94% des produits audiovisuels et logiciels commercialisés au Maroc étaient piratés». Durant ce mois d’août, le Maroc a enregistré une baisse de 24%. Les estimations parlent aujourd’hui d’un taux de 70%. L’objectif est d’arriver à atteindre 50% d’ici fin 2005.

Pour y arriver, d’autres opérations coup de poing sont programmées dans les prochains jours. «Avec l’arrivée des MRE, le mois d’août connaît un pic des ventes», est-il précisé.

Au lendemain de l’opération de Derb Ghallef, les commerçants de DVD et de CD piratés ne semblent pas inquiétés outre mesure. A l’ouverture du marché hier matin, les marchands donnaient plutôt dans l’ironie. «Si les autorités veulent vraiment lutter contre le piratage, elles savent ce qu’il faut faire», confiait un jeune. Elles n’ont qu’à s’en prendre à l’amont, c’est-à-dire au port de Casablanca par où transitent les CD vierges bon marché et les graveurs en provenance de Corée et de Chine». D’ailleurs, révèle-t-il, «on a été prévenu de l’arrivée des forces de l’ordre».

De l’avis de plusieurs vendeurs, c’est aux graveurs que ce type de commerce profite le plus et ce, depuis que tout ce qui est vidéo, donc image, est passé en format VCD. Il faut dire que les prix des CD en gros défient toute concurrence. A titre d’exemple, le CD vierge coûte 1 dirham. Les prix peuvent aller jusqu’à 2 DH selon la qualité. Quant aux DVD, ils coûtent 2,50 DH en gros. Pour ce qui est de la prestation de gravure, elle est de 5,50, voire 6 DH pour les DVD et 3 DH pour les CD, précise un étalagiste à Derb Ghallef.

Ce commerce récent nécessite quand même des connaissances en anglais, une parfaite maîtrise des noms d’acteurs et de chanteurs. Ce qui n’est pas l’apanage de «Monsieur tout le monde». Faute d’emploi, des centaines de diplômés chômeurs se reconvertissent sur cette activité «pour faire vivre leur famille», précise un jeune vendeur.

Amin RBOUB
Source : L'Economiste