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L'approche sécuritaire du Maroc au Sahara en question

Alors que la gestion diplomatique du dossier connaît un franc succès, l'approche sécuritaire appliquée au Sahara est de plus en plus dénoncée.

Le dossier des droits de l'homme au Sahara fait toujours l'objet d'une hésitation qui risque de coûter cher à la diplomatie marocaine. Alors que deux jeunes indépendantistes ont été libérés dimanche dernier, après avoir passé dix mois de prison pour avoir participé à une manifestation pro-polisario, l'AMDH (Association marocaine des droits de l'homme) nous apprend l'arrestation du responsable de sa section de Laâyoune, Hamoud Iguilid.

Nafii Assah et Abdellah El Boussati, âgés tous les deux de 20 ans, avaient été arrêtés le 20 juillet dernier et ont fait l'objet, affirment-ils, d'interrogatoires musclés une semaine durant avant d'être transférés à la prison locale de Laâyoune. Après plusieurs reports, leur procès s'est soldé par une condamnation à 1 an de prison ferme, prononcée en février dernier et qui n'a pas tardé à être revue à dix mois en appel. Comme si les autorités ne relâchaient des militants sahraouis que pour en arrêter d'autres, c'est la veille que Hamoud lquilid avait été interpellé. Celui-ci dit avoir été victime d'un enlèvement. La raison en est la participation de la section de Laâyoune aux manifestations célébrant le 1er mai dans la ville. «Quatre agents en civil m'ont interpellé à la sortie d'une réunion et m'ont embarqué dans une voiture avec d'autres agents à bord. On m'a menotte, bandé les yeux et fouillé de près, sans dire un mot. J'ai aussi été dépossédé de mon téléphone portable et d'une somme d'argent», dit le concerné, par ailleurs président de Codesa (Collectif des défenseurs sahraouis des droits de l'homme) ajoutant qu'il a été interrogé chemin faisant avant d'être relâché, à l'extérieur du périmètre urbain, et sommé de partir sans se retourner.

Des pratiques qu'associations de droits de l'homme au Maroc comme ONG internationales ne cessent de dénoncer. La dernière réaction en date est signée Human Rights Watch (HEW). Dans un communiqué diffusé sur son site Internet, l'organisation basée à New York relate le cas de deux activistes sahraouis, Dahha Rahmouni et Brahim Al-Ansari, arrêtés «arbitrairement» et «passés à tabac» en décembre 2007 à Laâyoune. Les deux «victimes» ont déposé plainte, mais les autorités ont refusé de prendre en compte leurs témoignages, clôturant l'enquête pour «manque de preuves» le 5 mai dernier, a déploré HRW. «Une vraie enquête aurait inclus les témoignages des officiers de police accusés d'abus comme ceux des défenseurs des droits de l'homme qui les ont accusés», a souligné la directrice pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord à HRW, Sarah Leah Whitson, largement citée dans le site de l'agence sahraouie d'information SPS. Au lieu de cela, «les autorités marocaines ont choisi d'entendre seulement une partie, montrant par-là qu 'elle ne sont pas impartiales», a-t-elle ajouté. «Chaque année, des centaines de Sahraouis portent plainte contre les abus de la police marocaine qui ne donne pas suite à ces plaintes», a dénoncé l'organisation internationale. Plusieurs eurodéputés sont également montés au créneau pour dénoncer, mercredi dernier, un climat «de répression, de persécution et de détention, dont sont victimes les populations sahraouies». Et de citer le cas de Naama Asfari Président du CORELSO (Comité pour le respect des libertés et des droits de l'homme au Sahara occidental) qui a été «arrêté à Marrakech, conduit les yeux bandés à une destination inconnue ou il a été battu durant son interrogatoire. Ni sa famille ni ses avocats n'en ont été informés». Au moment où le Maroc négocie un «tournant»décisif sur cette affaire, et où la gestion diplomatique remporte succès sur succès, ne serait-il pas temps de changer, sur le plan intérieur, de méthode?

Tarik Qattab
Source: Le Soir Echos

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