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Le Maroc doit revoir sa politique migratoire

Abdelhamid El Jamri, président du Comité des Nations Unies sur les travailleurs migrants appelle à une meilleure pratique du concept de l'immigration circulaire.

«Le Maroc doit revoir toute sa politique migratoire. Elle est en parfait décalage par rapport à ses besoins actuels», affirme Abdelhamid El Jamri, président du Comité des Nations Unies sur les travailleurs migrants. Cet expert marocain ne mâche pas ses mots. Pour lui, les changements mondiaux imposent au Maroc de tourner une nouvelle page dans sa manière de gérer la question migratoire. «Ce n'est pas concevable qu'on envoie nos compétences à l'étranger au moment où l'on a grand besoin de leur expertise), s'indigne-t-il. Et de citer en exemple les contrats proposés par l'ANAPEC pour l'envoi d'ouvrières saisonnières en Espagne. «Le marché a changé et, moi qui suis à l'origine même de ces contrats ANAPEC, j'estime qu'il faut les modifier», reconnaît-il. Par le biais de ces contrats, le Maroc encourage, dans le cadre de sa coopération avec l'Espagne, l'immigration dite circulaire qui à été au centre des travaux du 17e Forum économique et environnemental de l'OSCE (Organization for Security and Coopération in Europe). Au cours de cet événement, qui s'est tenu les 19 et 20 janvier derniers à Vienne, Abdelhamid El Jamri, représentant les Nations Unies, a précisé que le concept de migration circulaire, élaboré récemment par l'UE est «un compromis entre la position politique et la position économique des pays de l'UE. Depuis longtemps, nous observons une position duale despays de l'UE.. Une position politique qui veut arrêter ou réduire au minimum les flux migratoires vers l'Europe, une position du secteur économique qui veut, au contraire, le développement de ces flux vêts les pays de l'UE pour faire face aux besoins importants de l'Union en main d'oeuvre et pour fluidifier le marché du travail». Pour l'expert marocain, la volonté de l'UE de maîtriser en quelque sorte le flux migratoire par ce concept de migration circulaire confirme tout simplement «que la migration ne peut être arrêtée, que c'est un phénomène naturel et permanent, dont il faut tenir compte dans les relations internationales».

Le Forum a donc servi d'occasion pour mieux éclaircir ce concept, à commencer par cette proposition de retour volontaire. «L'immigré a le choix d'accepter ou de refuser. Mais le Maroc ne s'est pas encore prononcé officiellement sur cette proposition qu'offre l'Espagne. Le Maroc souhaite, toutefois, une politique intégrée pour l'immigration», fait remarquer Abdelhamid El Jamri. Ce dernier a proposé au Forum de l'OSCE de permettre aux migrants résidant dans les pays de l'UE de façon permanente de retourner temporairement dans leur pays d'origine en vue d'y travailler ou de créer une activité. «Plusieurs migrants souhaitent faire ce retour temporaire», a-t-il souligné, «mais face à la crainte de perdre leur droit de séjour, ils préfèrent se sédentariser». L'expérience l'a montré, des migrants des pays de l'est, avant que leurs pays d'origine n'intègrent l'UE, pratiquaient cette migration circulaire, parce qu'ils avaient la possibilité de retourner dans le pays d'accueil quand ils le souhaitaient. «Un migrant roumain », explique Abdelhamid El Jamri, «qui résidait de façon permanente en France, avait la possibilité de retourner dans son pays pour y monter un projet d'activité économique. Et à chaque fois qu'il avait besoin de liquidités supplémentaires, il avait la possibilité de retourner en France et d'y travailler pendant un certain temps». «Les migrants originaires des pays du sud de la Méditerranée n'ont pas cette possibilité-là», souligne cet expert marocain. «Personne ne conteste, aujourd'hui, le rôle que jouent les migrants dans le développement des pays d'accueil, de transit et d'origine. Il est recommandé que les pays d'accueil collaborent avec les pays d'origine pour mettre en place des programmes permettant d'optimiser l'impact des migrations sur le développement», estime Abdelhamid El Jamri appelant ainsi les Etats à un partenariat fort et étroit autour de la migration légale et aussi autour de la migration dite illégale.

Les saisonniers

Dans ses propositions au Forum de l'OSCE, Abdelhamid El Jamri a expliqué que pour les travailleurs saisonniers, il serait important et humain, de les faire partir dans le cadre d'un projet de développement. Et que la période de migration saisonnière ne soit qu'une étape de la réalisation de ce projet mis en œuvre lors du retour dans le pays d'origine. L'expert marocain a précisé que des programmes de développement existent déjà dans différents pays et qu'il suffisait de les articuler et de les mettre en synergie avec les programmes de migration. Il a donné à titre d'exemple, la synergie qui peut être créée entre les programmes de migration saisonnière de l'ANAPEC au Maroc et l'INDH. Il a précisé que beaucoup de migrants saisonniers trouvent des difficultés à récupérer leurs droits à la retraite et qu'en Europe les régimes sociaux ne sont pas tous contributifs et beaucoup de pensions ne peuvent être transférables à l'étranger.

Leïla Halloui
Source: Le Soir Echos

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