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Polémique en Espagne sur les Marocains affiliés à la Sécu

Le PSOE y voit la réussite de l'opération de régularisation
"Les étrangers affiliés à la sécurité sociale en Espagne dépassent en nombre 1,5 millions de personnes". Il a suffi de ce chiffre publié par le ministère de l'emploi et des affaires sociales, qui indique par ailleurs que 8,7 % des affiliés à la sécurité sociale sont des travailleurs étrangers, pour que l'Espagne politique se mette en émoi. Une polémique est alors née sur le rôle effectif ou supposé des étrangers dans la construction de l'économie espagnole. La réaction est ainsi immédiate de la droite espagnole qui se fait par médias interposés.

Le quotidien El Mundo monte au créneau pour désigner non moins que "l'improductivité de la main-d'œuvre immigrée ", celle là même qui vient gonfler le chiffres des contribuables à la sécurité sociale espagnole.


De fait, l'éditorialiste du quotidien El Mundo minimise le rôle de cette main-d'œuvre dans la croissance de l'économie espagnole. L'augmentation du nombre des immigrés affiliés à la sécurité sociale "est préoccupante dans la mesure où elle reflète et anticipe une économie peu productive.

L'Espagne nécessite l'immigration, mais pour maintenir le bon rythme de croissance des dernières années, il ne suffit pas de gonfler le taux d'emploi avec des travailleurs étrangers", affirme El Mundo.

Et le quotidien de se demander : "Peut-on dire que l'immigration constitue l'un des principaux moteurs de notre économie ? ". Sa réponse est sans équivoque. "Oui mais avec des nuances.

Sur 10 affiliés étrangers, 8 proviennent de pays non communautaires. La majorité provient de l'Equateur, alors que le Maroc est le deuxième pays en nombre d'affiliés. Il s'agit, par conséquent, de main-d'oeuvre peu qualifiée, qui ne fait que grossir la base de la pyramide salariale", soutient El Mundo.

Un raisonnement par l'absurde auquel le quotidien El Pais répond par un autre éditorial à la fois plus réaliste et plus mesuré. L'éditorialiste estime au contraire qu'avec "un modèle basé sur la construction et le tourisme, qui absorbent beaucoup de main-d'oeuvre, personne ne peut nier aujourd'hui le rôle déterminant de l'immigration (la plus élevée en Europe) dans la forte croissance espagnole durant la dernière décade".

L'argumentaire du journal El Pais est appuyé par des statistiques qui montrent comment l'Espagne est passée, il y a à peine 7 ans (en 1998), d'un taux de natalité des plus bas au monde à des niveaux proches des autres partenaires de l'Union Européenne avec 1.590.187 étrangers affiliés à la sécurité sociale contre seulement 260.000 en 1998.

Le parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) ne pouvait rester indifférent à la polémique et réagissait immédiatement par la voix du porte-parole de son groupe parlementaire, Antonio Hernando. Ce dernier voit dans les chiffres présentés par le ministère de l'emploi et des affaires sociales la "réussite" du processus de régularisation des immigrés mené par le gouvernement entre les mois de février et mai de cette année 2005.

"C'est la première fois dans l'histoire de l'Espagne, indique le député socialiste, qu'à la suite d'un processus administratif on peut mesurer réellement le nombre d'immigrés qui se sont affiliés à la sécurité sociale et c'est la première fois aussi que l'on peut constater que les immigrés contribuent au maintien de l'état du bien-être en Espagne ", affirme-t-il dans un communiqué.

M. Heranando a, par ailleurs, souligné que les immigrés qui se sont affiliés au système de la sécurité sociale contribuent de fait, à travers leurs cotisations, à soutenir les pensions des espagnols qui aujourd'hui accèdent à la retraite, comme ils contribuent au maintien de système de la santé et de l'éducation à travers les impôts qu'ils payent.

Le député espagnol profite de l'occasion pour appeler le parti rival du PSOE, en l'occurrence le parti populaire (PP), mené par Mariano Rajoy, à mieux considérer la "réussite indiscutable " de la politique gouvernementale en matière d'immigration, à se défaire de son attitude "hostile" à cet égard et à accepter le dialogue avec l'exécutif pour la mise sur pied d'un "Pacte d'Etat" en matière d'immigration.

Hormis ce discours de bataille politique, il convient de retenir dans les propos du membre du Cortès espagnol que les immigrés montrent un point d'honneur à s'acquitter de leurs devoirs de citoyens dans l'espoir d'une meilleure intégration. Sauf que celle-ci, au mieux ne se fait pas toujours dans les bonnes conditions et au pire n'est jamais qu'un rêve jamais atteint.

Pour preuve l'analyse faite, mercredi, par l'éditorialiste du quotidien El Pais et qui souligne "l'autre face du phénomène". C'est en constatant l'état précaire de l'intégration des immigrés que le journal appelle à la nécessité d'adapter l'Etat de bien-être de l'Espagne à cette augmentation de la population, en incluant "les nécessités d'intégration de ces trois millions d'immigrés, dont plusieurs sont venus pour rester".

Une intégration qui commence, selon le journal, par l'octroi du droit de vote aux immigrés, au moins lors des élections locales espagnoles. "Un jour, il faut voir s'ils (les immigrés) ne devaient pas jouir du droit de voter, au moins dans les élections locales en Espagne, comme le font déjà les résidents provenant des pays de l'UE, et comme c'est le cas en Belgique et en Irlande: celui qui cotise, vote". Une analyse qui mérite méditation.


Les chiffres qui font peur à la droite

Avec le processus de régularisation des immigrés qui a pris fin en mai dernier (du 7 février au 7 mai), le nombre de travailleurs étrangers affiliés à la Sécurité Sociale a augmenté en juillet dernier de 94.711 personnes, pour atteindre en début du mois d'août courant 1.590.187 immigrés affiliés, dont 295.090 ressortissants de pays de l'Union Européenne et 1.295.097 ressortissants de pays non communautaires.

Par nationalités hors Union Européenne, les Equatoriens viennent en tête (253.197), suivis des Marocains (226.287), des Roumains (134.067), des Colombiens (129.341), des Péruviens (58.816), des Argentins (50.684), des Chinois (48.070), des Bulgares (37.782), des Boliviens (31.568) et des Ukrainiens (31.432).

Pour les ressortissants des pays de l'UE, les Britanniques occupent la première position avec 52.882 affiliés, suivis des Italiens (48.463), des Portugais (40.163), des Allemands (35.633) et des Français (18.289).

Source: Le Matin

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