«La marine nous suivait, et pour arrêter la patera, elle a utilisé un instrument tranchant, un couteau attaché à un bâton, qui a perforé le canot pneumatique, ce qui a provoqué la noyade». Cette fois-ci, le témoignage n'est pas recueilli par un «hostile» journal espagnol, mais par une association marocaine, l'AFVIC (Association des amis et familles des victimes de l'immigration clandestine).
Les propos se rapportent au tristement célèbre naufrage, le 28 avril dernier, d'un canot pneumatique avec, à son bord, soixante candidats subsahariens à l'immigration clandestine. Ils confirment les informations relatées par le quotidien «El Pais», mettant en cause des membres de la Marine royale marocaine dans un drame qui a fait selon l'association 29 morts, dont 4 enfants et 4 femmes. Une mise en cause décriée de toutes parts du côté des officiels marocains. Une commission d'enquête de l'association a donc dû mener ses propres investigations en interrogeant huit survivants et en reconstituant le film des événements. Des témoignages, on apprendra qu'elles étaient deux pateras à prendre le départ vers les côtes espagnoles à partir d'El Hoceima. La première embarcation a été interceptée par la Marine royale marocaine et remorquée vers les côtes marocaines.
Peu après, la seconde patera a à son tour été arrêtée. «Contrairement à la première, elle a refusé d'obtempérer aux sommations de la Marine royale. Parmi les passagers, se trouvait le connexion man, personne qui a en sa possession l'argent des passagers», lit-on dans le rapport de I'AFVIC. Ce qui explique le fait que la patera ne se soit pas arrêtée. «La Marine royale nous suivait à la même vitesse, les soldats ont volontairement perforé le bateau pneumatique», dit un témoin. En l'espace de quelques minutes, un côté du zodiac s'est dégonflé, provoquant le chavirement de l'autre bord de l'embarcation. Cette arrestation a entraîné un mouvement de panique. Certains ont tenté de se rattacher au zodiac et ont péri noyés. Un deuxième navire de la Marine royale a rejoint le lieu du drame et a tenté de porter secours aux victimes et assistance aux rescapés. «Mais c'était déjà trop tard pour beaucoup de morts.... On nous a jeté une corde, c'est avec cela qu'on nous a sauvés», dit un autre témoin cité dans le rapport.