En moins de dix jours, plusieurs localités au nord comme au sud du pays se sont retrouvées submergées par les eaux. Comment s'organise l'intervention dans ce genre de cas ? Qui en coordonne l'exécution ?
La sonnette d'alarme a été tirée à Nador. La réaction de la population aux intempéries qui ont frappé la ville et fait d'importants dégâts matériels a frôlé l'émeute. Iminitanout a repris le témoin. Même catastrophe, à une plus grande échelle en ce qui concerne les dégâts et pertes humaines, et même réaction de la population. Au point que les habitants ont jeté des pierres sur les forces de l'ordre et les éléments d'intervention arrivés sur place. Tout cela pose une question essentielle : le Maroc ne dispose-t-il pas d'un mécanisme d'intervention automatique, rapide et efficace pour faire face aux conséquences des catastrophes naturelles ? «Il existe pour le moment une coordination très poussée entre les différents services concernés», précise Mohammed Elyazghi, ministre d'Etat. L'homme, qui avait engagé alors qu'il était encore ministre de l'Aménagement du territoire, un processus de réflexion et d'organisation de prévision et d'interventions en cas de catastrophes naturelles, déplore néanmoins l'absence de moyens matériels et de ressources humaines suffisantes à même de permettre de faire face avec célérité et efficacité à ce genre de situation. Seulement, constate-t-on, la plus grande partie de ces moyens sont centralisés au niveau du département de l'Intérieur dont la préoccupation est plus sécuritaire qu'humanitaire. La protection civile, les agents d'autorité, les forces auxiliaires et la gendarmerie forment en effet la première ligne du front lors de toute intervention dans des cas pareils.
Mais c'est une lourde machine, lente à démarrer et qui intervient généralement en retard. Ce qui provoque la colère des populations. A moins, précise-t-on, que ne pleuvent des instructions d'en haut. Mohamed Elyazghi le confirme : le roi «peut donner une bonne impulsion aux interventions». Néanmoins, tient-il à préciser, «les mécanismes d'intervention se sont améliorés, il y a une plus grande coordination entre les départements de l'équipement, de la protection sociale, de la santé et la protection civile, les forces auxiliaires et la gendarmerie». Mais au-delà d'une coordination aussi poussée soit-elle, il est aujourd'hui plus que jamais question de créer un organe autonome spécialisé, comme c'est le cas dans plusieurs pays, l'Italie par exemple. Le département de l'Aménagement du territoire avait déjà entamé, il y a quelques années sous la direction d'Elyazghi, des prises de contact avec les experts de ce pays. Mais ces concertations en vue du transfert d'expérience et du savoir-faire n'ont pas été poussées jusqu'à la création d'un organisme indépendant dédié à la question.
Heureusement que des députés ont pris la relève et rouvrent ce débat devant le Parlement. Une proposition de loi portant création d'une Agence nationale pour la prévision et le suivi des interventions en cas de catastrophes naturelles et technologiques a été présentée, en ce sens, par le groupe parlementaire du parti de l'Istiqlal. L'organisme se chargerait de coordonner les interventions et d'en garantir la rapidité et l'efficacité. Il reviendrait également à cette Agence, selon la proposition soumise au bureau de la première Chambre en décembre dernier, d'établir la part des responsabilités et du champ d'intervention des différents intervenants (autorités publiques, collectivités locales et société civile nationale et étrangère). En attendant, un arsenal de textes existe déjà, il a été complété par un décret adopté, fin janvier, en conseil du gouvernement portant élargissement des prérogatives des services de la protection civile. Un toilettage rendu nécessaire après le séisme d'El Hoceima. Car, soutient M. Elyazghi, «depuis ce tremblement de terre, les procédures d'intervention en cas de catastrophe naturelle ont connu un tournant décisif».Ce qui est encore plus rassurant, ajoute-t-il, c'est qu'aujourd'hui «il y a, dans le monde, des moyens et des méthodes efficaces pour mieux faire face à ces catastrophes. Ce qui est encore plus rassurant, c'est cette prise de conscience de la population qui a mis de côté son fatalisme, ne considère plus ces catastrophes comme une calamité et donne un sérieux coup de main aux forces d'intervention». Pour le reste, «c'est un problème qui se trouve au cœur des préoccupations des Nations Unies parce que c'est un problème qui va s'aggraver davantage durant les prochaines années», conclut-il.